Face à la police, face à la justice : mur jaune !

En quelques semaines seulement, les pratiques d’autodéfense contre la police se sont répandues comme une traînée de poudre. Si ce n’était pas une évidence pour tous à l’origine, cela s’est imposé comme tel au fil des semaines pour une bonne partie du mouvement GJ : il s’agit de se protéger de la police. Elle entrave nos manifestations, débloque nos blocages, frappe, gaze, mutile. Aujourd’hui des techniques défensives et offensives pour tenir la rue ou les blocages malgré la présence des keufs se sont diffusées et généralisées. On vient avec des masques à gaz, des lunettes, on est prêts à renvoyer les lacrymos (tout en évitant les mutilations sur d’autres types de grenades), on monte des barricades … Bref, on ne se laisse pas faire, on lutte ! Les pratiques d’autodéfense à ce stade sont relativement collectives et solidaires et chacun apprend de jour en jour.

Mais se prémunir de la répression, ce n’est pas seulement au moment de l’affrontement avec la police. L’autodéfense c’est aussi tenter d’éviter les arrestations, les fouilles. Il faut également se défendre après l’arrestation, lutter contre l’individualisation et l’isolement propre au système judiciaire. De la rue au tribunal et jusqu’à la prison, nous devons nous défendre collectivement. Cette question n’est pas annexe à la lutte. Elle en est même le cœur. Un mouvement fort est un mouvement qui est en mesure de soutenir toutes ses pratiques face à l’État, y compris celles qui font débat au sein de nos espaces d’organisation. Accepter les termes du pouvoir, au sujet des « casseurs », des « violents », c’est laisser la porte ouverte à la police et à la justice pour qu’elles continuent à frapper et enfermer les gilets jaunes. On doit fermer la porte, refuser la dissociation.

Dans la rue

On peut être arrêté à différents moments que ce soit en manif, en action, sur un blocage, même chez soi. Parfois le pouvoir estime qu’il ne faut pas laisser passer tel ou tel acte et il ouvre une enquête afin de trouver des individus par tous moyens même longtemps après les faits notamment par la vidéosurveillance (ex. les dégradations de l’Arc de Triomphe).

C’est pour éviter d’être retrouvé et arrêté suite à une enquête qu’il est primordial de faire attention aux signes qui permettent de nous identifier formellement (vêtements distinctifs, tatouages voyant). Il est donc important de se dissimuler le maximum quoi qu’on fasse d’un peu répréhensible. Il s’agit de faire attention à ce qu’on filme avec le portable. Les vidéos peuvent souvent nous incriminer nous ou nos proches. Cette habitude de tout filmer permet aux flics d’identifier des personnes et de boucler des enquêtes.

Arriver en manifestation ou en action n’est pas toujours aisé. Les keufs nous ont souvent précédés, notamment sur les manifestations. Ils se permettent de nous fouiller (sacs, véhicules, palpation) souvent à la recherche d’explosifs, armes ou autre matériel potentiellement offensif. Les masques à gaz sont d’ailleurs considérés comme des armes (A2) et leur port ou transport est interdit. Le port d’arme ou ce qui peut être considéré comme une arme par destination est, pour un tribunal, un indice justifiant l’incrimination de participation à un groupement violent, dite « participation à un groupement en vue de commettre des violences ou dégradations », qui permet de justifier toutes les gardes à vue, même si l’arrestation a eu lieu deux heures avant la manifestation.

Les autres matériels de protections (masque, casque) n’entrainent pas nécessairement une garde à vue mais sont souvent confisqués par la police.

Il est donc important de tenter d’éviter les fouilles. Il est souvent possible de trouver des passages non contrôlés par la police. Des éclaireurs peuvent également être envoyés pour trouver un passage libre, parfois il s’agit d’attendre un peu après le début de la manif pour apporter le matériel, ou de le cacher à un endroit stratégique avant la manif afin de pouvoir le récupérer sur le chemin …

Lorsqu’une personne est interpellée pendant la manif, il est toujours possible d’empêcher l’arrestation tant que les menottes ne sont pas mises. En agissant collectivement le rapport du nombre permet l’exfiltration de la personne en question.

Les flics ciblent parfois des personnes actives en suivant les indications d’infiltrés, de gens de la BAC ou de CRS. Il est important de protéger ces copains là (qu’on les connaisse ou pas). Tant que le nombre et la détermination seront là, l’arrestation sera compliquée. Mais c’est souvent quand ça se calme qu’elles ont lieu. Éviter de laisser seules les personnes potentiellement repérées, les aider à se cacher derrière vous pour changer de vêtement avant de quitter les lieux sont autant de réflexes qui peuvent éviter des arrestations ou quelques incriminations. Les gilets jaunes, c’est la solidarité.

En garde à vue

Malgré les précautions prises, les arrestations sont pourtant encore trop fréquentes et se défendre contre la répression ne s’arrête pas aux portes du commissariat.

Les arrestations sont souvent faites dans le tumulte de la manifestation et le dossier est régulièrement mal ficelé tant et si bien que l’accusation compte souvent sur l’aveu des arrêtés pour pouvoir poursuivre sans risquer la relaxe. Par ailleurs, tout ce qui est dit en garde à vue sera retenu contre soi-même ou quelqu’un d’autre. Enfin, à ce stade, personne n’a aucune idée de ce que contient le dossier et quels sont les éléments probants, pas même l’avocat qui vient nous assister en garde à vue. C’est la raison pour laquelle il est primordial de garder le silence, quelles que soient les pressions qu’on subit. C’est le métier des keufs d’essayer de nous faire parler, ils sont pleins de techniques différentes, comme nous reprocher tout un tas de choses pour nous en faire admettre au moins quelques unes, nous faire croire qu’être honnête peut nous attirer l’indulgence du parquet. Tout cela est faux et la seule réponse à leur donner est de n’avoir RIEN A DECLARER !

Également, l’ADN et la signalétique (les empreintes) vous seront systématiquement demandés. S’il parait anodin de les donner et qu’on vous explique bien que refuser d’entrer dans les fichiers de la police est un délit, c’est aussi un droit de refuser. Ces éléments peuvent parler pour vous dans des enquêtes ou instructions à venir, il est conseillé de refuser de se soumettre au prélèvement. On vous le reprochera certainement à l’audience mais des collectifs de soutien ou avocats peuvent vous aider à justifier votre refus…

A l’issue de la garde à vue, soit vous repartez libre avec ou sans convocation soit on vous amène au tribunal pour être présenté au procureur (voir schéma). Le procureur décidera des suites (convocation postérieure, rappel à la loi ou comparution immédiate).

Au tribunal

Si la comparution immédiate est décidée par le procureur, vous serez dans un premier temps présenté devant une assistante sociale en amont pour une « enquête sociale rapide ». Attention encore, ce que vous lui dites sera répété, amplifié voire déformé à l’audience. Il est aussi conseillé de refuser cette enquête sociale.

En comparution immédiate, il est proposé de prendre du temps pour préparer sa défense. C’est une possibilité qu’il faut saisir pour plusieurs raisons. Votre jugement sera plus éloigné du temps des faits et cela permet de préparer une réelle défense. Vous aurez ainsi le temps d’étudier votre dossier en profondeur. Dans ce cas un débat s’ouvre sur ce qu’il sera fait de vous en attendant votre prochaine comparution (contrôle judiciaire ou détention provisoire). C’est la raison pour laquelle il est primordial d’avoir préparé en amont des GARANTIES DE REPRESENTATION pour éviter la case prison : attestation de domicile, pièce d’identité et contrat de travail (ou certificat de scolarité, attestastion RSA etc.) principalement.

En cas d’incarcération

Si l’incarcération est prononcée par le tribunal, l’autodéfense face à cette phase ultime de la répression est toujours possible. Il faut au maximum éviter l’isolement des personnes incarcérées et de leurs proches … Toutes les démonstrations de solidarité sont extrêmement importantes pour la personne en taule… là encore les collectifs de soutien peuvent vous renseigner et vous filer un coup de main pour organiser la solidarité !

Pour aller plus loin :

Le collectif CADECOL a sorti un guide d’autodéfense juridique trouvable ici en version numérique et sur leur site, régulièrement actualisé, pour commander la version papier à très bas prix ! On conseille à tous les groupes de GJ d’avoir au moins un guide auquel se rapporter.