Toulouse : l’auto-organisation c’est cool mais c’est long !

Nous avons tous ressenti l’immense force que possède le mouvement. Un tel rapport de force n’avait plus été possible depuis des décennies. Et nous avons construit cela de manière horizontale. Personne ne l’a confisqué ou dirigé en sous-main. Ni syndicats, ni partis. Même les leaders auto-proclamés nous les avons tous refusés ! Que ce soit pour les prises de ronds-points, les blocages économiques ou les manifs du samedi, nous nous sommes organisés dans le mouvement, par le mouvement et pour le mouvement, avec toujours en perspective l’élargissement et le renforcement. Trois mois de lutte acharnée plus tard, nous constatons une certaine baisse de la fréquentation des lieux où l’on s’organise. Pourtant il règne un consensus : ancrer le mouvement dans la durée, défendre les espaces d’organisation que nous avons créés, tout en évitant la sclérose.

Les points de rencontres

Par chez nous, il y a plusieurs espaces où l’on se capte et se coordonne.
Il reste deux ronds points tenus dans Toulouse, à l’ouest et au nord de la ville. L’un pas loin de l’entrée d’un centre logistique, la Socamil, l’autre d’une zone industrielle le rond point de Sesquière. Ce sont des lieux occupés en permanence (la Socamil pas de nuit, Sesquière si) des lieux de passage, où l’on est sûr de trouver des Gilets.On y passe pour avoir des infos, discuter avec des camarades de lutte autour d’un café, voir ce dont on a besoin pour que l’occupation se fasse dans les meilleures conditions, en profiter pour diffuser des textes auprès des voitures qui passent ou même organiser des actions de blocage ou autre afin de renforcer de le mouvement. Bref, le quotidien de la lutte au sens large.
Un point-info fixe se tient aussi à 18h du lundi au vendredi dans le centre ville, dans le quartier de Saint Cyprien. Il permet d’ancrer la lutte dans le quotidien, de se retrouver et se tenir au courant. Ce point-info apporte un ancrage géographique de plus. Il tient une assemblée tous les mercredis sur la place du Ravelin, à 18h.

Une assemblée centrale ou de coordination ?

Depuis deux mois, une assemblée générale à l’échelle de la ville a également vu le jour. Appelée à l’origine pour fédérer les groupes des ronds points, elle a connu depuis pas mal de fluctuations. Elle se tient tous les 15 jours. La première rassembla plus de 600 personnes mais sa fréquentation chute de quinzaine en quinzaine. C’est qu’en tant qu’espace central d’organisation du mouvement sur la ville, cette assemblée concentrait pas mal d’enjeu. On y a longtemps, et sûrement trop, débattu de la question du vote et des prise de décisions. Un reproche assez récurrent ces dernières semaines est aussi d’être trop déconnectée du mouvement réel. Pour autant, maintenir un espace où nous rencontrer est une nécessité, d’autant que c’est depuis cet espace que sont nés plusieurs groupes ou commissions qui permettent d’organiser le mouvement.

La commission action

Une commission action se réunit une fois par semaine. Le nombre y est variable, d’une petite centaine à plus de 300. On s’y retrouve pour préparer tout un tas d’actions en vue de construire le rapport de force, visibiliser le mouvement, bloquer l’économie, montrer en acte notre soutien à ceux qui galèrent, tout ce qui nous permet d’agir contre nos merdiques conditions de vie et de travail.
La commission se tient en plusieurs temps. Après un premier temps de discussion en assemblée plénière, nous nous retrouvons en atelier pour avancer sur les diverses propositions, avant de faire un retour en fin d’assemblée avec l’agenda de la semaine. Certains ateliers sont permanents. Celui sur l’organisation des manifs se tient depuis le début de la commission. On y définit le lieu de départ, et on a essayé plusieurs tactiques, comme des points de ralliements intermédiaires en cas de coupures par la police, la mise en place d’éclaireurs. Pour autant, ce n’est pas du tout le seul lieu de préparation des manifs. Ainsi, des groupes s’organisent pour ramener en manif des banderoles renforcées afin de se protéger des flashball.
Plus récemment une commission grève et jonction qui vise à s’organiser avec les boites en grève sur la région, dans la perspective de faire tâche d’huile, s’est mise en place. Elle se tient durant la com action. Elle dispose aussi d’un canal Telegram. L’idée est d’appuyer, partout où c’est possible, les gilets jaunes en lutte sur leur lieu de travail, de faire la jonction avec les salariés.
Parmi les actions organisées avec la com action, citons des blocages routiers comme celui du 13 janvier dernier, des blocages d’entreprises, des actions de soutien à des travailleurs en grève, des occupations de pôle-emploi en solidarité avec les chômeurs.

D’autres commissions

Une commission communication fait le lien avec les différents admin et se tient une fois par semaine. Il s’agit surtout pour cette commission de servir de relais au différentes initiatives.
Une commission politique/revendication ne s’est pour ainsi dire jamais tenue, devant l’impossibilité de nous mettre d’accord (et de nous limiter) sur une liste de revendications.
Une commission de Défense Collective (DC) s’est montée pour s’organiser contre la répression. Vous retrouverez dans ce numéro de JAUNE le texte de présentation de la DC.

Le virtuel

Enfin, un ensemble d’espaces virtuels d’organisation se sont mis en place. Notamment des groupes Telegram et Signal pour l’organisation concrète. Des groupes et pages facebook existent aussi, vous vous en doutez ! Ce sont les cadres les plus classiques du mouvement. Ils sont pour autant beaucoup moins utilisés qu’au début, notamment chez les GJ les plus actifs.
Il est bon de noter qu’à Toulouse, nous avons eu la chance de voir se monter la première brigade de police spéciale « GJ » avec une insistance sur l’aspect cybercriminalité. Les instructions n’ont peut-être pas fini d’apparaître.
Voici un petit panorama, pas exhaustif bien sûr. Une chose est sûre, conserver ce maillage d’organisation est précieux. Tout cela est à construire ensemble en évitant le repli sur des petits groupes affinitaires, tendance qui menace le mouvement depuis ses débuts.
Et vous, comment ça se passe par chez vous ?